LA MER étageait ses portées de hautes notes d'acier bleu. Elle chantait pour nous un chant très pur altéré parfois par le claquement sourd d'une lame profonde contre les soubassements de la jetée.
Et comment dirons-nous l'heure de midi alors qu'elle s'allongeait et paressait sous le soleil au zénith - et ses ondulations ralenties miroitaient comme des poissons d'argent.
le matin, au lever des mouettes, une vapeur fleur-de-pêcher dispersait les brumes de la nuit et le soleil s'élevait en laissant un instant une trainée pourpre sur les eaux.
Alors on distinguait les points noirs immobiles des barques parties à la pêche avant l'aube.
Îles...
Au matin, une fois, vous nous êtes apparues : trois petites taches bleutées au milieu d'un éblouissement de lumière.
Et puis, souvent, nous avons tendu nos têtes et tourné nos regards vers l'immensité du large
Espérant de vous voir surgir à nouveau, et nous réconfortant de vous savoir placées comme des bornes dans l'étendue de la mer,
Repères et refuges des oiseaux migrateurs et des barques.
Tel pêcheur, à l'heure où la flotille investit le rivage de l'odeur salubre du poisson frais,
Nous avait dit vous avoir longées souvent : "Ce ne sont que de grands rochers gris avec quelques touffes d'herbes".
Mais nous comprenions bien qu'il ne révélait pas tout, ou qu'il avait mésestimé, si proches et presqu'invisibles, les îles et leur mystère.
© Pierre Etienne / le rempart des îles / les presses de Taizé 1965
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