à la mémoire de frère Paul
Tu es le premier.
Désormais sur l'autre rive tu nous attends et nous te rejoindrons, l'un derrrière l'autre,
Ce sera la Communauté fraternelle de l'autre monde, constituée un peu en désordre. Difficile de prévoir les places à table, les arrivées seront soudaines.
J'imagine très mal l'autre rive : y a-t-il des bosquets ombragés, et tout un monde attend-il que la chaleur du jour soit passée pour s'éveiller à un signal ?
Sera-ce le son criard d'une conque marine, une trompette au long col de style médiéval ou bien des anges munis de prte-voix ? Pourtant le texte nous dit "au son de la trmpette" - alors tant pis ! Ce sera un réveil bruta.
Peut-être avons-nous mal compris. Ce ne serait pas un sommeil total mais un peu comme ici-bas au creux de la nuit : notre cœur continue à vivre et tous nos sens battent la campagne sur les sentiers des rêves.
Tu es le premier.
Chaque famille à sa manière retrouve une forme de la communion des saints. Tu es allé accrocher la chaîne, et bientôt nous serons nombreux à nous donner la main.
Pour ma part je prie très mal, mais je me dis que parmi les frères certains sont plus près de toi par le lien de leurs prières.
Ces choses sont difficiles à dire et à croire. Mais il serait plus difficile d'admettre qu'un homme baptisé ça disparaît dans le néant comme un caillou dans l'eau profonde.
Tu es le premier.
Avant ton départ nous étions des enfants, immergés dans une éternité terrestre. Le sablier ne se vidait jamais, la journée s'écoulait, immense, interminable.
Maintenant nous savons que c'est vrai : le soir et sa cape de soie va s'abattre sur nos épaules. Ensemble nous saurons attendre l'ultime issue, car le déroulent que tu connus n'était que provisoire.
Patiente encore un temps, pour le meilleur et pour le pire nous saurons te rejoindre.
Toussaint 1966
© Pierre Etienne / lente remontée depuis les rivages / les presses de Taizé 1969 ... p. 53 à 55
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